Le mois d'avril touche à sa fin, rythmé par des températures changeantes, des journées ensoleillées et des pluies réconfortantes. En réfléchissant à ce que je voulais vous écrire, j’ai envisagé ce mois comme celui des transitions, des changements.
Les changements, petits ou grands, sont au cœur de nos vies et de nos conversations : de l’enfant qui doit changer d’école, à l’adulte qui entre dans le monde du travail, en passant par celui ou celle qui doit s’engager sans trop comprendre ce qui l’attend. Les “sauts en parachute”, comme l’a si bien dit une personne avec qui je discutais des changements et de toutes les angoisses qu’ils pouvaient renfermer.
Le saut en parachute : on tente, on finira bien par être rattrapé. J’ai envie de pousser le cliché en vous disant : “l’important c’est pas la chute, c’est l'atterrissage”, mais je n’ai pas trop compris cette phrase. Je crois que c’est pour ça que vous recevez ce mail : j’ai besoin d’écrire pour aller d’un point A à un point B, pour ne pas voir le changement comme une chute mais plutôt pour préparer mon atterrissage.
C’est une réflexion fragmentée, dispersée, mais qui finira par faire sens dans quelques jours, dans quelques mois, dans quelques années. Pour l’illustrer, je vous propose de plonger avec moi dans mes carnets, de tenter de lire entre les lignes de tous ces poèmes. Il me faut me débarrasser de quelques feuillets pour en écrire d’autres.
Août 2024 :
Tu as attendu l’été toute l’année Comme si l’hiver et le printemps Ne renfermait rien Et que le temps n’avait de valeur Que s’il était ensoleillé Tu as attendu l’été Sans savoir qu’il pouvait offrir, lui aussi, Des jours pluvieux Des secondes moins heureuses Tu as attendu l’été Comme un enfant impatient Avant chaque anniversaire Journée si précieuse Qu’elle lui fait oublier Qu’il a pleuré avant de s’endormir
Novembre 2022 :
Je voulais que l’été dure toute l’année, Je ne pensais pas que des matinées ensoleillées Seraient assombries par des tempêtes lacrymales. Je ne voulais que les rires et la sérénité, Je ne savais pas que les adultes, aussi, peuvent avoir mal.
Mai 2022 :
Lasse de m’endormir Au contact de nos mille et un souvenirs, Je préfère parfois fuir le sommeil. Il m’arrive encore de te chercher Dans les grandes assemblées D’entendre ta voix Dans les creux de mon esprit. Tu n’as jamais écrit, Peut-être voulais-tu Écraser nos moments D’un grand silence.
Avril 2022 (mon extrait préféré de la deuxième édition de Bloom on the Ocean, que vous pouvez toujours vous procurer en m’envoyant un petit message) :
Tu ne cesses de m’échapper.. je te cherche dans le ciel, Mais je ne parviens plus à te trouver. Tu adoucissais mon coeur, Désormais tu fuis mon regard. Tout le monde me dit : « Je l’ai vue ici », « je l’ai vue là ». Tu es partout où je ne suis pas. Notre monde trop connecté Me fait ressentir plus vivement notre séparation. Je te vois, dans les yeux des autres. La simplicité de notre lien Se détruit peu à peu. Peut-être t’ai-je trop regardée, Peut-être ai-je oublié que tu es éphémère. Ta douceur est sans pareille ta fuite est permanente. Mais ce soir, ce soir, ce soir, Peut-être ma dernière chance de te voir. Tu es teintée de rose, Est-ce un signe ? Fais-tu appel à l’essence de ma fleur ? J’ai couru pour t’apercevoir, Et te voilà, face à moi. Mon coeur se brise devant ta beauté. Tous les moments passés à t’admirer Me reviennent. J’entends toutes les fois où j’ai dit : « Regarde, elle est là ». Tu as porté mes plus beaux souvenirs. Alors, si c’est la dernière fois que je peux poser les yeux sur toi : "Merci pour les étoiles que tu as posé sous mon ciel."
Juillet 2023 :
J’ai appris que la vie n’était pas faite pour être contrôlée, que l’amour ne devait pas être planifié. Difficilement, j’ai appris que la vie devait être vécue, aimée, détestée. Elle doit être agitée, triste, joyeuse, surprenante. J’ai appris que l’on ne perdait pas grand chose en essayant, mais que l’on pouvait tout perdre dans ses regrets. J’ai appris que l’on pouvait aller au bout du monde, mais que ce voyage était inutile si l’on n’est pas prêt à se trouver. J’ai appris que courir ne servait à rien, car le rythme de la vie est fait pour construire des édifices, pas des châteaux de sable.
En vous écrivant, j’ai repensé au livre de Khalil Gibran, Le Prophète, à toutes les sagesses qu’il renferme, à tous les changements qu’il célèbre. “Ce n’est qu’en t’abreuvant à la rivière du silence que tu parviendras à chanter à pleine voix. Et c’est en arrivant au sommet de la montagne que tu commenceras ton ascension.”
Pour finir ce mail, un livre et une chanson :
Le retour du roi Jibril - les contes de la cité, un roman à plusieurs voix qui est un recueil d’histoires de jeunesse, de famille, d’amour
La chanson Naked d’Ella Mai, une ode à la vulnérabilité, pour ouvrir son cœur à l’amour en attendant l’été.
Je vous souhaite de beaux sauts en parachute.
Hadidja Shona